La nuit, il y en a qui bavent, bercés par Morphée.
D'autres qui bâtifolent sous les draps, biberonnent dans les bars, bougent leur boule, en boîte ou ailleurs.
Et puis, il y a ceux qui badent, seuls dans leur coin. (Et si tu n'es pas Bébé, personne ne va venir te chercher*). Ils rejouent la journée dans leur tête. La dissèquent. Finissent des disputes avortées avec leurs collègues en sortant de leur chapeau en surchauffe de nouveaux arguments. Se mettent parfois à faire le bilan de leur vie sur les 10 dernières années ou se triturent les méninges sur des problèmatiques qui ne sont pas de leur ressort .
Après une journée merdique, une nuit merdique. La double peine, en somme.
Il n'y a rien de pire que bader en silence. Seul à seul dans sa tête.
D'ailleurs, parfois, il faut que ça sorte : quand vient l'obscurité, ceux qui ont le seum sortent du bois et squattent les libres antennes pour "sauver" leurs nuits blanches. Comme l'enseignait dans les années 80, Rémi Sans Famille, grand maître de la pensée positive : "plus on est de fous, moins la vie est dure".
Es-tu déjà tombé à l'improviste sur l'émission de la nuit d'Europe 1, animée par la psychologue Caroline Dublanche ? Pour suivre cette émission sans céder à des pulsions suicidaires, il faut être psychologiquement blindé. Un temps, j'ai même soupçonné les auditeurs d'être en réalité des comédiens payés par la station pour inventer des témoignages abracadabrants.
Comme cette dame, qui a appelé il y a quelques semaines, pour évoquer un accident de travail qu'elle a eu à cause d'un taureau "à la ferme". Depuis, son bras gauche est "mort". Son second mari est handicapé car il a eu la polio à la naissance, et elle n'a pas de relations sexuelles avec lui car elle a peur de lui faire mal "à sa petite jambe". Elle a un fils (du premier lit, donc) hyperactif, travailleur handicapé. Sa fille de 17 ans vit mal les problèmes de mémoire de son père biologique (problèmes consécutifs à une rupture d'anévrisme). Elle a un autre garçon (ou est-ce le travailleur handicapé ? J'ai un peu perdu le fil) qui est tombé sur une patronne qui a voulu "l'incorporer" comme son fils.
(Ca fait pas un peu beaucoup pour une seule personne ?!)
Cette émission possède les mêmes vertus que Jechange.fr, site qui "permet de réduire les factures de la vie courante" en comparant les tarifs des différents fournisseurs d'énergie. La libre antenne d'Europe 1 est également un excellent comparateur de VDM** : il te permet de "revoir à la baisse le coût émotionnel des contrariétés de la vie courante".
Si un auditeur m'appelait pour bader dans #ViensCracherTonFielChezTatieDanièle, mon show nocture***, je lui dirais d'une voix suave d'hôtesse de l'air qui vient de se shooter au millepertuis :
Quand on est au bout de sa vie, qu'on craint de ne jamais terminer ce voyage au bout de la nuit, il faut garder à l'esprit qu'on ne restera pas éternellement prisonnier de cet espace-temps, comme Bill Murray dans "Un jour sans fin". Rappelez-vous, son personnage était condamné à revivre encore et encore la même journée. Mais même lui a fini par trouver une issue. Il faut garder espoir donc, et rêver à des nuits meilleures. Avant de vous quitter, j'aimerais partager avec tous les auditeurs qui broient du noir - et Dieu sait que vous êtes nombreux à nous écouter, à ce propos merci, sans vous, je serais au chômage technique ahaha- cette merveilleuse citation de Charlie Chaplin :
"Rien n'est permanent dans ce monde de brutes, pas même nos problèmes".
C'était donc ma contribution au défi 53 billets en 2015, lancé par Agoaye. Tous les posts de cette #Semaine 11 (et oui, déjà) se trouvent ICI.
* Référence à Dirty Dancing
** VDM pour Vie de Merde. La VDM a cela de particulier qu'elle a souvent l'air invraissemblable et pourtant, les pires VDM sont les plus authentiques.
***Je ne l'ai pas encore mais j'en rêve ! L'avantage d'avoir sa propre émission, c'est que tu peux te payer le luxe de péter une durite en direct, en prenant toute la France à témoin, comme Pascale Clark qui bade sévère depuis le non-renouvellement de sa carte de presse.
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