La semaine dernière, Europe 1 a diffusé un reportage sur des employés en pétard, dans la Loire. La raison de leur colère : leur nouveau patron. Un Anglais. Non francophone. O-M-G !
Je ne sais trop où en est l'antagonisme grenouille/rosbif, mais je pense que le mariage princier dont on nous a rebattu les oreilles pendant un mois (avec l'abominable point d'orgue d'hier déjà fondu enchainé avec le grand débat du jour : quelle destination pour le voyage de noces gnark gnark gnark) n' a pas dû aider.
"Ils veulent un patron qui parlent français" a titré Europe1.fr
C'te bonne blague. Et pour parler de quoi, s'il-te-plait ? De Kate et de sa robe ? Ou de sa soeur peut-être ? Aaah, des salaires, pardon. En ce qui me concerne, cette petite barrière linguistique ne m'aurait pas empêché d'aller demander une augmentation : "Hey boss, wazzzzzaa : If i was a rich girl nananananananananaaaa + Money money money must be fun in the rich men's world + get rich or die tryin' boss, you know what I mean ?
On peut difficilement faire plus explicite, tu en conviendras. Il est vrai que moi au moins je connais mes basics. On ne peut manifestement pas en dire autant de tout le monde. Suis mon regard : pourquoi les employés en pétard refusent de parler anglais, d'abord ?
40% des Français avouent crânement ne maîtriser aucune langue étrangère.
Dans les faits, il s'avère qu'ils ont tout autant de mal à s'exprimer dans leur propre langue. Ceci expliquant certainement cela.
Le français sur le bout de la langue ?
Il est où tu veux mais pas dans tous les cerveaux à mon avis.
Voilà un domaine qui redonne tout son sens à notre beau slogan "Liberté, égalité, fraternité" :
Liberté de malmener les règles grammaticales, égalité qui unit la France d'en bas et les nantis des moyennes et hautes sphères dans un même comportement délinquant envers leur langue natale et fraternité d'une nation en osmose : alors que chacun baragouine sa propre version du français, tout le monde se comprend ! c'est -y pas merveilleux, ça ?
Voilà qui rend les échanges verbaux attractifs et heu..parfois bizarres voire surréalistes :
"Tu as un peu trop la langue pendue" Giuseppe, de Qui veut gagner un Bolos épouser mon fils (oui, j'ai regardé tous les épisodes mais c'était en replay alors ça ne compte pas) à une prétendante.
"Tu as la même incarnation de moustache que Johnny Depp". Une anonyme, dans le métro, à son pote.
"On se demande c'est à quoi ça leur a servi ?" Le Président Nicolas il y a deux ans à des journalistes.
Le Français, ce coq indomptable
Alors que certains étrangers parlent un français que Maître Capello (paix à son âme) aurait salué, une grande majorité de la population semble vouloir s'en tenir à l'usage d'un dialecte extravagant.
Certains croillent que c'est qu'on est couillon.
Ne pourrait-on pas plutôt y voir un anticonformisme vaillant, une liberté de pensée qui refuse de se laisser brider, une inclination irrépressible pour l' Apeuprisme (mouvement idéologique qui élève le manque de précision, le non-sens et le contresens au rang d'art contestataire) ?
Lis, jouis et choisis.
"Nul ne le sait mieux que personne" La voix off de Qui veut épouser mon fils (oui, encore, je sais, je devrais pleurer de honte) une phrase-équation qui s'annule d'elle-même : moi je dis chapeau bas l'artiste.
"La nuit porte sommeil" Julien, le rouquin de Vaut mieux entendre ça que d'être sourd l'Amour est Aveugle.
" Il faut avoir conscience de la profondeur de la question du sens". Jean Pierre Raffarin (notre équilibriste du Verbe préféré).
Une langue vicieuse
Tout le monde est prêt à l'admettre : le français est traître, compliqué, illogique blablabla. N'oublie pas que c'est également la langue officielle de l'amour ( si la phrase Voulez-vous coucher avec moi ce soir est devenu un classique international, c'est pas pour rien) alors oui, forcément, le français fait fourcher.
"Rédigé de manière plus claire, c'est un gode, un code qui sera finalement un code des bonnes pratiques" Rachida Dati.
"Il est conseillé d'éviter les grands sexes des liaisons sud du pays". Une journaliste radio info trafic.
"Des soldes qui selon les premières constatations satisfessent les commerçants lyonnais". Une présentatrice télé.
Pour en revenir au sujet initial, c'est petit de blâmer ce pauvre patron anglais : comment apprendre une langue réinventée au quotidien par un peuple monoglotte à l'imagination fertile ?
À en croire Europe 1.fr, ils ont quand même trouvé une solution dans la Loire :
"Pour y remédier au problème, la direction a annoncé le recrutement prochain d'un patron francophone."
Le français est mort, vive le Français !
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