La démission de Benjamin Millepied de l'Opéra de Paris est un choc. Après la diffusion documentaire "Relève" de Canal + consacré au jeune directeur de Ballet, on avait repris espoir. Son discours novateur sur le bien-être des danseurs et sur la diversité au sein des danseurs avait touché cette France qu'on s'acharne à laisser sur le banc de touche et qu'on cache comme une maladie honteuse :
"J’ai envie d’avoir une compagnie en 2015 qui soit diverse, qu’on ait des danseurs de nationalités différentes, de couleurs différentes sur scène. J’ai entendu très clairement en arrivant qu’on ne met pas une personne de couleur dans un corps de ballet parce que c’est une distraction: c’est-à-dire que, s’il y a vingt-cinq filles blanches avec une fille noire, on ne va regarder que la fille noire. Un corps de ballet, tout le monde doit être pareil; pareil, ça veut dire que tout le monde doit être blanc. Quand on arrive des États-Unis et qu’on entend ça, ça fait peur. Je vais commencer à dire que c’est un problème. C’est une énorme connerie de dire ça. Il faut que je casse cette idée qui est raciste. Comment on va changer le public du ballet si on n’a pas des gens sur scène dans lesquels le public peut se reconnaître? Si nous, avec l’art, on ne peut pas être un exemple pour notre société, alors où va-t-on?".
Quelques semaines après tombe la nouvelle de cette démission. Y aurait-il un lien de cause à effet ?
Interrogée le 05 février dans la matinale d'Europe 1, l'ex-danseuse étoile Aurélie Dupont, qui succède à Benjamin Millepied s'est emmêlée les pinceaux en reconnaissant être au courant d'avoir le job -"C'est pour toi", lui aurait confié le directeur de l’Opéra, Stéphane Lissner-, trois-quatre semaines avant la démission du chorégraphe et sans que ce dernier soit au courant. Le journaliste Thomas Sotto s'en est étonné : "Mais Benjamin, il a choisi de partir ou on lui a demandé de partir ?". "Il a choisi de partir", a répondu, catégorique, la danseuse. "Mais il avait déjà sa remplaçante avant d'annoncer sa démission ?", insiste un Thomas Sotto aussi perplexe que nous. Ce à quoi Aurélie Dupont va rétorquer d'un ton pincé : "Ca ne s'est pas passé comme ça". Et on n'en saura pas plus.
Est-ce que la vision moderne de Benjamin Millepied a fait peur en haut lieu ? On va arrêter là les suppositions.
Aujourd'hui, la couleur de la peau ne devrait plus être un problème. Dans le mileu artistique, encore moins qu'ailleurs. Mais les préjugés ont la vie dure. Cependant, choses avancent et si la France a besoin de modèles pour se montrer plus "audacieuse", il n'y a qu'à regarder chez nos voisins :
Une Clara noire dans Casse- Noisette, en décembre dernier, à l’Opéra National de Hollande.
Américaine originaire de Sierra Leone, Michaela Deprince (jeune talent que certains d'entre vous ont peut-être découvert dans le sublime documentaire de Bess Kargman intitulé "First position" ) est devenue la première danseuse noire à interpréter ce rôle.
Une Hermione noire à Londres en mai, dans la pièce de théâtre "Harry Potter et l'enfant maudit". Certes, certains fans arriérés se sont offusqués en apprenant que le rôle avait été attribué à Noma Dumezweni, mais ils s'en remettront... ou pas. Et franchement, qui s'en soucie ? Le monde poursuivra sa course, avec ou sans eux.
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